Author
Servel, Laurence
Guichard, Renelle
Type
Article accepté pour publication ou publié
Abstract (FR)
De toutes parts se font entendre aujourd’hui de vibrants plaidoyers pour l’innovation et
la créativité. Ces pratiques sont présentées, pour l’entreprise, comme des armes de poids
dans un monde de plus en plus concurrentiel et, pour l’individu, comme un mode
privilégié de réalisation de soi. Ce qui a longtemps été considéré comme
potentiellement dangereux parce que contradictoire avec un ordre stable (en latin
médiéval le mot innovation est synonyme d’hérésie – Girard, 2002) est aujourd’hui non
seulement fortement souhaité mais, plus encore, encouragé. À ces appels à l’innovation
correspond un regain d’intérêt pour la figure du novateur (chercheur, entrepreneur,
découvreur, usager-novateur, créateur, artiste, et dans une certaine mesure travailleur du
savoir…), en bref, pour celui qui est l’acteur d’un changement remarquable. Le
novateur devient la vedette de nombre d’émissions de télévisions, de radios, un sujet
idéal pour la presse économique à destination du grand public… La période
contemporaine est ainsi peuplée d’inventeurs géniaux, de créateurs inspirés, de
chercheurs féconds, d’entrepreneurs imaginatifs. C’est au fond un portrait romantique et
enchanté du novateur qui nous est proposé. Au-delà de cette image d’Epinal, on peut se
demander jusqu’où les novateurs partagent un certain nombre de traits culturels. Peut-on
parler d’un idéal-type de l’acteur de l’innovation!?
Les travaux classiques concernant l’innovation, tant en économie qu’en sociologie, nous
livrent des pistes pour répondre à ces questions. Cependant, ils s’intéressent de manière
privilégiée à l’innovation comme processus et donc davantage à ce que font les
innovateurs plutôt qu’à ce qu’ils sont. Sur la base de ce constat, nous proposons
d’utiliser la notion d’identité, et la manière dont elle a été conceptualisée en sociologie
des organisations, pour dégager quelques dimensions structurantes propres à l’acteur de
l’innovation. Le cas de l’usager-novateur, envisagé à partir de travaux d’économistes,
permet de tester la pertinence de cette approche en termes d’identité.